Mardi 4 février 2025, le groupe de travail “école participative” de HELMo ESAS invitait Olivia Fleuvy, chargée de campagne chez Amnesty International, et Nadia Farkh, coordinatrice de l'Association belgo-palestinienne (ABP), à intervenir en conférence.

La première a présenté le rapport historique d’Amnesty Internationale publié le 5 décembre, permettant de qualifier de génocide la campagne militaire de l’armée israélienne. Cette prise de position durant un conflit en cours est une première pour Amnesty International (AI).

Le rapport d’Amnesty s'appuie sur la Convention de l'ONU de 1948, établie après la Shoah, pour définir le génocide à travers cinq critères (1) :

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Le rapport d’Amnesty International met l’accent sur trois des cinq actes interdits au titre de la Convention sur le génocide, à savoir :

(a) le meurtre de membres du groupe,

(b) les atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe,

(c) la soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence visant à entraîner sa destruction physique totale ou partielle.

Le dossier d’Amnesty International qui aboutit à la qualification de génocide a été constitué à partir des témoignages de Gazaoui.e.s, d’organisations humanitaires et associations locales, ainsi qu’à travers des images satellites, couvrant la période d'octobre 2023 à juin 2024.

Amnesty souligne que le droit de la guerre existe et qu'il est crucial que les cibles soient militaires et justifiées, ce qui n'a jamais été prouvé dans de nombreuses situations : les frappes ont ainsi ciblé des écoles et des hôpitaux, prouvant l'intention d'imposer des conditions de vie insoutenables. Les destructions ont été d'une ampleur et rapidité sans précédent : 62% des habitations et 85% des écoles ont été endommagées. Le nombre de tué.e.s est actuellement impossible à chiffrer avec précision mais de nombreuses voix estime qu’il est largement supérieur aux chiffres rapportés par les autorités palestiniennes : + de 50 000 civils ont ainsi perdu la vie à Gaza.

Le critère d’intentionnalité a été identifié par Amnesty et il repose notamment sur les déclarations déshumanisantes et génocidaires de responsables gouvernementaux et militaires israéliens et israéliennes2. Ainsi, “Amnesty International a examiné 102 déclarations faites par des responsables gouvernementaux et de l’armée israéliens entre le 7 octobre 2023 et le 30 juin 2024, qui déshumanisaient la population palestinienne, qui appelaient à commettre des actes génocidaires ou d’autres crimes à leur encontre, ou qui les justifiaient.(...) 22 déclarations qui émanaient spécifiquement de responsables israélien·nes directement responsables de la gestion de l’offensive à Gaza, qui semblaient appeler à commettre des actes génocidaires contre les Palestinien·ne·s de Gaza ou qui les justifiaient. Ce qui constitue une preuve directe de l’intention génocidaire.3”.

Il faut noter ici que quelques semaines après l'offensive du Hamas, des experts de l'ONU ont alerté au sujet du risque de génocide.

Le cessez-le-feu ne signifie d’ailleurs pas la fin du processus génocidaire : les conditions de vie indignes persistent ; 80% des foyers subissent une famine imposée et les maladies se propagent à un rythme alarmant, provoquant une crise humanitaire sans précédent.

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Nadia Karkh a ensuite pris la parole, précisant la position de l’APB (association belgo-palestinienne). Elle a rappelé que le conflit israélo-palestinien n’a bien entendu pas commencé le 7 octobre. Les Palestiniens*Palestiniennes vivent une très longue oppression depuis la Nakhba4 en 1948 jusqu’au génocide actuel, en passant par un régime d’apartheid (la qualification d’apartheid est également utilisée par Amnesty International5).

Elle a également rappelé que le droit international autorise le droit de légitime défense individuelle ou collective (article 51 de la Charte des Nations Unies). Dès lors et selon l’ABP “le peuple palestinien dispose bien d’un droit de résister à l’occupation, y compris à travers la lutte armée, [mais] ce droit n’est pas absolu. Ainsi, si le Hamas peut être considéré comme un parti de résistance, il est tenu de respecter le droit international humanitaire. Contrairement aux attaques contre des objectifs militaires, celles commises contre des civils le 7 octobre sont contraires au droit international et constituent des crimes de guerre, voire des crimes contre l’humanité.”

La coordinatrice de l’ABP a rappelé que la violence du régime israélien vis à vis de la population palestinienne ne se limite pas à la région de Gaza : la répression actuelle prend également la forme d’attaque par des colons israéliens (civils armés) sur des populations palestiniennes. Ces attaques s’accentuent aujourd’hui en Cisjordanie (avec la complicité de l’armée israélienne). Cette violence crée un climat constant de peur pour les Palestiniens*Palestiniennes.

Il a également été rappelé que ce génocide s’inscrit dans un processus long et très ancien de de déshumanisation des populations palestiniennes.

La très récente déclaration de Trump proposant d’exiler les gazaoui.e.s pour faire de Gaza “la Côte d’Azur du Moyen Orient” exemplifie d’ailleurs tragiquement les pratiques coloniales et déshumanisantes appliquées depuis des décennies par les autorités étasuniennes et israéliennes. - ceci avec le soutien (ou le silence) complice des autorités européennes.

Et à HELMo ?

La conférence a donc mis en lumière la nécessité d’une action immédiate (par tous les acteurs*actrices de la société civile). A HELMo, nombreuses sont les personnes correctement informées qui partagent le constat des conférencières, d’où le souhait que la Haute Ecole prennent position.

La cellule “Ecole participative” a lancé une pétition, visant à demander à la haute Ecole de prendre position. Celle-ci a rapidement récolté près de 300 signatures. La question du positionnement est donc à l’ordre du jour de l’Organe d’administration du 13 février prochain.

PS : Amnesty précise que des outils de communication comme des affiches et un dossier pédagogique sont disponibles sur demande ; des affiches et documents pédagogiques sont également disponibles auprès de l’Association belgo-palestinienne.